Il y'a quelque semaines de ça, lors d'une discussion sur un blog lambda, je me suis retrouvé à parler d'"empathie", et à en quelque sorte chercher à redorer le blason de ce terme que certains confondent avec "hypocrisie". Répondre à ce Mr X m'a fait un peu réfléchir sur ce principe d'empathie et j'ai eu envie de vous retranscrire ici notre discussion pour avoir vos avis sur la chose.
Mr X: comme si l'empathie pouvait être autre chose qu'un concept naïf"
Moi: pour certains ils semblent que ça le soit, pour d'autre il s'agit d'un OUTIL de travail comme un autre. Le mécanisme essentiel de l'empathie est l'imagination, en serait tu dépourvues Mr X? *angel face*
Mr X: toutes les théories à la con utilisées en Skills for International Management ou en psychologie et qui mixent Sympathy and Empathy me font gerber le caramel. Comment peut on oser, comment peut on avoir la prétention de vouloir comprendre autrui
- avec sa propre interprétation et feelings (sympathie) logiquement éloignée de celle de la personne étudiée,
- en essayant de se mettre à la place de l'autre (empathie) alors même qu'on a pas le même vécu, la même sensibilité, la même appréhension du monde.
L'empathie est à mon sens un concept nebuleux qui permet à des coach de merde ou des psy charlatans de gagner leur croute sur le dos de cadres ou patients bonne poire. Parler d'imagination c'est fouler du pied toute capacité d'analyse. Je maintiens donc mon propos sur l'empathie et lui prefere à la place la diplomtie, l'intelligence des situations, le tact.
Moi: (...) en branchant ta charmante cervelle tu te serais probablement rendu compte que l'empathie dont JE te parle, celle que j'utilise TOUS les jours me permet de mieux TRAITEZ mes patients, so les Trainings en International Management sont le dernier de mes soucis.
Moi suite: J'ai envie de revenir sur les commentaires de mon Mr X. Pour commencer, et afin de me faciliter l'écriture et de vous faciliter la lecture j'ai décidé unilatéralement que X était un HIM et non SHE, si ce n'est pas le cas deux ou trois de mes amis peuvent arranger ça de façon très convaincante (mobiles disponible sur simple coup de fil).
Pour revenir à cette notion d'empathie tellement honnie par mon nouvel ami. Tu me parles de management ou de Skills for international management ou alors de coaching (cette dernière étant l'invention d'un génial cabinet norvégien afin de soutirer encore plus de tunes à leurs clients très fan de leur divers tranings et autre sodomie de dioptère). Quand moi je te parle d'un outil dans le cadre d'un exercice scientifique et d'un champ de recherche passionnant en neurosciences ou en sciences cognitives.
L'empathie pourrait être définie comme la capacité à simuler, à imaginer, à tenter de reconstituer en soi, sur un plan intellectuel comme sur un plan émotionnel, ce qui se déroule dans l'expérience d'autrui. Les mots ont leur importance Mr X, je dis bien tenter! Chaque expérience (des autres, de moi, du monde) est unique. Je ne peux ressentir l'expérience de l'"autre" telle qu'elle se développe à l'intérieur de son univers. Ce que je peux faire c'est tenter en moi de reconstituer l'univers de l'"autre", en m'appuyant sur de approximations successives, basées sur des échos, des indices que l'autre me donne parcimonieusement via son langage verbal, corporel etc...L'empathie ne relève pas de la magie jeune homme, il s'agit d'un processus, processus qui évolue à coup d'échec, d'essais, de tests...c'est un processus qui se fait doucement, à tâtons. Le besoin d'empathie est dicté par la non-compréhesion de l'"autre", c'est celle ci qui est le moteur intellectuel mais aussi affectif du processus empathique. L'empathie ne me permet pas de totalement comprendre l'autre, mais elle me permet de "meet on common ground", de le retrouver sur un terrain commun. Qualifié l’empathie de concept naïf équivaut à rejeter le simple fait de chercher à comprendre son prochain, ça relève quasi de la misanthropie !
En conclusion l'empathie ça peut s'apprendre Mr X, d'ailleurs ça s'enseigne (cette phrase n’est pas de moi, mais elle conclu bien mon propos). Cf un très bon article à ce sujet dans la revue "Academic Medecine" réalisée par une équipe de l’Irvine College.
Mr X: Alors je te répond Youyou, (un brin condescendant avec ton "jeune homme" d'ailleurs)
Je reviens donc sur le mot 'tenter' car tout est là. Ce qui me gêne énormément ce n'est pas l'effort effectué pour tenter de comprendre l'autre, bien au contraire, mais le fait même qu'on veuille théoriser et "scientifiser" un processus empirique qui ne fait pas appel à des mecanismes renouvelables mais bel et bien à une sensibilité et une interprétation propre à chaque événement et à chaque médecin (...) ; ce faisant, cela cantonne donc cette tentative au stade de l'hypothèse pour rester dans une démarche purement scientifique. De là ma conclusion qu'il est extrêmement hasardeux de vouloir analyser les propos d'un patient en reformulant ses dires. Invariablement on fait rentrer en jeu notre propre appréciation, notre propre interprétation et on jette donc un peu plus de hasard au sein du processus thérapeutique.
Moi: (un brin condescendant avec ton "jeune homme" d'ailleurs)» Je sais, le ton professoral et paternaliste me semblait le plus approprié dans le cadre de ma réponse. Ce ton me semblait aussi légitime pour répondre à ton « va crever» qui est violent, gratuit , sans fondement et accessoirement blessant..
En lisant ta réponse je me suis rendu compte que l’on parle de deux choses différentes, tu parles d’analyse, de reformulation des dires. Ce sont des choses qui viennent APRES, elles ne font pas partie du processus d’empathie, pas pour moi, pas dans ma façon d’être empathique avec mes patients quand je les prends en charge. (...) Je n’analyse pas, je n’interprète pas les termes utilisés par mon patient mais je lui fait comprendre que je suis présent, que je suis AVEC lui, sans m’investir trop émotionnellement (ce qui me ferait verser dans la sympathie) .
« une interprétation propre à chaque événement et à chaque médecin » Bien évidemment ! et heureusement ! C’est pour ça que ça ne se théorise, ça se transmet par le compagnonnage, ça se transmet par la discussion et non l’enseignement magistral, ça se transmet au lit du patient ou en situation réelle. « on jette donc un peu plus de hasard au sein du processus thérapeutique. » off course, il faut toujours garder à l’esprit que le processus thérapeutique est par définition quelque chose d’aléatoire, ton processus thérapeutique dépend du médicament et du médecin. Le médecin EST 50% du médicament, par opposition au 50% de chimie/chirurgie pure. La relation médecin malade est PRIMORDIALE et elle passe, elle s’établie, par un processus d’empathie. Ensuite elle évolue.
Enfin, voilà, allez have a good day et Enjoy :)